LE POINT DE BASCULE

Dans un précédent article, je vous partageais une de mes expérience de coaching régénératif, en format « individuel ». Aujourd’hui, voici une autre expérience, ma toute première en collectif !

Accouchement de soi

Juin 2020 : sortie du premier confinement et accouchement d’une décision professionnelle et personnelle : faire la place dans mes accompagnements de transitions individuelles ou collectives à un mode plus « régénératif », afin de mieux répondre à des besoins d’ouvrir de nouvelles perspectives, de retrouver une action inspirée et prenant sa source dans les motivations profondes. Un chemin sur lequel je m’étais moi-même mis en route pour moi-même, plus depuis un appel « intérieur » que par une décision mentale.

Ce recentrage dans mes accompagnements allait rapidement prendre vie, pour la première fois, lors de l’accompagnement d’une structure E.P.I.C de 300 personnes. La direction lance son projet O.S.E dans le cadre du dispositif régional ELENCE. Son besoin est multiple : être accompagné pour s’adapter à l’imposition de nouveaux points réglementaires ainsi qu’à l’évolution en cours des besoins clients, construire une vision plus partagée au sein du CODIR avec l’encadrement, accroitre la coopération entre les managers et entre les équipes, colorer la culture par une approche plus globale de la performance pour le 3ème plan RSE. Et Être à l’écoute de tous les collaborateurs.

Je percevais 3 composantes essentielles à régénérer : régénérer la vision en joignant les enjeux externes et les difficultés rencontrées au quotidien dans les activités, régénérer la confiance et l’envie de co-créer les étapes à franchir, régénérer le sens de la performance en élargissant le spectre des valeurs.

Formant une équipe avec 3 partenaires *, Il a fallu nous concentrer d’abord sur la cohésion du CODIR et dessiner la vision à présenter auprès des équipes : une vision suffisamment définie pour donner un cap en adéquation avec les orientations fixées par le conseil d’administration, et suffisamment ouverte pour laisser une véritable place à la construction avec les équipes. Ce fût une période de 5 mois pendant lesquels ce CODIR a travaillé entre les séances d’accompagnement, a communiqué en interne auprès des équipes, a écouter l’encadrement intermédiaire. 5 mois pendant lesquels l’engagement et l’ouverture du leader, son alliance avec la DRH, ont été déterminant pour la suite : nous construisions ensemble à partir d’un schéma à la fois structurant et évolutif.

Puis arrive ce séminaire de 2 jours avec tout l’encadrement intermédiaire, une trentaine de managers :  un moment clef pour « s’embarquer ensemble dans OSE ». Le premier jour est conçue de manière à créer les conditions d’une rencontre à la fois inspirante et concrète, à susciter des échanges les plus ouvertes et sincères possibles. Échanges, réflexions, partages, liberté de parole (dans un cadre défini) permettent de naviguer collectivement sur une histoire commune incluant les 25 dernières années passées, le futur et le présent :

·      La rétrospective met en lumière la trajectoire de l’entreprise pendant les 25 dernières années, les défis déjà traversés avec réussite, ce qui vient favoriser la compréhension et l’ouverture intergénérationnelle.

·      La vision future et les enjeux du secteur sont présentés à plusieurs voix par les membres du CODIR, laissant place ensuite à l’expression et à la réflexion en sous-groupes sur les bénéfices perçus, les craintes et les risques, et les questions que ça soulève.

·      Les irritants actuels et opérationnels du travail sont identifiés, reliés, et priorisés par les 30 managers, avec un écho positif du CODIR sur le fait de s’exprimer librement sur ce qui fonctionne bien et sur ce qui ne fonctionne pas.

Un atelier d’exploration est lancé sur les 5 familles d’irritants priorisés en direct par les managers, une exploration à travers les 6 champs de valeurs de la performance globale pour comprendre collectivement les impacts de ces irritants et aussi pour sensibiliser sur l’interdépendance entre les 6 champs de valeurs. Décloisonner ces champs de valeurs, c’est favoriser le décloisonnement des équipes, c’est aussi appréhender les projets de façon plus globale, plus collective.

Une bonne énergie s’est installée, engagement et légèreté se diffusent dans l’atmosphère.

La logique habituelle aurait voulu qu’on passe maintenant aux plans d’actions. Eh bien non !

Le point de bascule

A 16h00, un moment crucial de la journée est dédié à l’expression authentique et sincère. Je partage le fait que parfois, dans l’enthousiasme d’une journée collective, on se sent plein d’élan et que la « volonté » pouvait retomber une fois de retour dans les urgences du quotidien et les habitudes de fonctionnement.

Le groupe a été invité à prendre un temps de silence de 15 mn pour s’interroger sur ce qui, selon chacun, devait changer dans les habitudes de fonctionnement de l’entreprise. Les questions posées sont simples mais percutantes : « Qu’est-ce qui a besoin de prendre place dans notre fonctionnement pour relever notre défi commun ? Que faudrait-il modifier, arrêter, lâcher dans nos habitudes de fonctionnement pour cela ? » et « Qu’est-ce que, moi individuellement, j’ai aussi besoin de lâcher ? « .

Au début des 15 mn, quelques rires jaunes apparaissent, avant de laisser place à un silence rempli de présence. Tout le travail amont avec le CODIR et depuis le début de la journée permette de toucher à cette qualité de présence qui ne peut être décidé.

Un cadre de protection, déjà validé avec le CODIR, invite à une expression libre et uniquement ceux qui le souhaitent, ouvre un espace sécurisé où chaque voix compte. Les réponses sont variées, reflétant là la fois des tendances communes et aussi une diversité de perspectives et d’expériences au sein de l’entreprise.

Certains participants témoignent de ce qu’il commence à voir différemment et de choses à lâcher à leur niveau. D’autres réalisent qu’ils doivent lâcher prise sur leur désir de contrôle absolu pour laisser place à une plus grande autonomie et responsabilisation des équipes.

Au-delà du contenu, quelque chose de difficile à décrire se produit, comme si le groupe prenait corps : chacun pouvait dire sa vérité, sans vouloir avoir raison, et ça circule. Après l’ouverture des idées et de l’esprit, ce moment invite à l’ouverture du coeur, à une expression plus profonde, selon l’envie de chacun.

Ce moment de bascule a ouvert l’élan, la confiance, l’authenticité, dans le respect des envies et des limites de chacun.

Cette expérience vécue est la clef essentielle pour vivre ce qui peut devenir une culture commune d’entreprise et aller de l’avant ensemble.

À 17h00, nous clôturons cette première journée. Chacun exprime ses impressions et écoute le vécu des autres. Une attente ressort pour le 2ème jour : « il faut concrétiser par des actions ! ». Ils ont raison, c’est pour cela qu’il y a un 2ème jour.

La concrétisation

La 2ème journée démarre sur les échos de la veille et nous percevons tout le chemin fait depuis la veille. Nous voyons s’exprimer des personnes qui ne s’étaient pas exprimées la veille sur les habitudes à lâcher. Puis nous continuons sur la concrétisation et la construction des chantiers et la manière d’impliquer les 260 autres collaborateurs dans la démarche. Sur 30 managers, 25 ont été volontaires en fin de journée pour s’engager dans les chantiers.

Ce séminaire a été un moment de bascule pour la suite d’OSE :  un moment généré par différentes étapes depuis 5 mois, régénératif de sens et d’élan par une collaboration vivantes entre les accompagnateurs et l’équipe de direction, en faisant des enjeux humains un enjeu autant stratégiques que les enjeux liées à l’éco, à la RSE, à l’excellence opérationnelles et à l’expérience clients.

L’entreprise dispose alors des clefs pour poursuivre son projet OSE avec un sentiment de confiance renforcée et une volonté commune d’évolution.

Et vous ?

Chers lecteurs des Graines du Renouveau : que vous inspire cette histoire ? Quelles questionnements ou résonance viennent à vous ? je serai ravi de partager nos réflexions.

*Les 3 partenaires : Corinne Bourgeois, Laure Rosenstiel, et Thierry Viejo Del Val, pour cette belle mission.